Les souterrains de Bologne recèlent les mystères de l'Histoire et aussi les secrets, moins héroïques, de nos contemporains. Le sergent Sarti Antonio, depuis trente ans officier de police dans les romans de L. Macchiavelli, va être entraîné sous leurs voûtes par le meurtre de Mainardi Zodiaco. Le mort aurait eu des relations avec la mafia et de la drogue a été trouvée chez lui. La solution est donc simple, mais Sarti Antonio ne croit plus aux choses simples. Et puis, il y a cette vieille femme qui, en tant que bonne citoyenne, n'admet pas l'attitude violente de la police à l'égard des immigrés.
L'enquête va mettre Sarti en contact avec les représentants du pouvoir politique, de l'Eglise, de la magistrature, et personne ne souhaitera l'aider. Ses alliés seront des personnages imprévisibles qui le guideront à travers le labyrinthe des canaux et des couloirs d'une ville inconnue, où la loi ne se risque pas. Il y partira, en une sorte d'épreuve initiatique, sans illusions toutefois sur l'efficacité de la justice, à la recherche du Dragon...
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Il s'en passe des choses, dans les entrailles de Bologne ! Entre les restes d'aqueducs romains, les souterrains de la Renaissance et les canaux enterrés après la guerre, une ville parallèle s'est peu à peu constituée sous la capitale de l'Emilie-Romagne. Pour Loriano Macchiavelli, cette cité cachée constitue une métaphore. Une ville qui a connu un attentat comme celui de la gare ou l'affaire dite " de la Fiat Uno ", dans laquelle des ripoux avaient été mêlés à suffisamment de braquages pour faire 24 morts, a bien des choses à cacher. En 1974, quand cet autre Machiavel a lancé le personnage du sergent Sarti Antonio, ces événements restaient à venir. Sa fiction a donc précédé la réalité dans une série de romans dont le succès aura tel qu'il a suscité deux séries TV en Italie. Les Editions Métailié ont choisi un des derniers parus pour commencer ses traductions. I sotterranei di Bologna mêle toutes sortes d'intrigues dévoilant la face noire du pays : immigration incontrôlée, néofascisme, communisme avachi et bureaucratisé. La sensibilité de gauche de Macchiavelli rejoint celle de Sandrone Dazieri, que publie également la maison parisienne. Le polar est devenu le genre par excellence du roman politique au-delà des Alpes. Si l'auteur a ici du mal à retomber sur ses pieds, il n'en tient pas moins le lecteur en haleine. C'est drôle, bien torché, avec des personnages plus colorés que nature. Ne se nomment-ils du reste pas Antionetta Velodromi, Mozart Marino, Pellicano Marmocchi ou Insignato del Carmine ?Etienne DumontLA TRIBUNE DE GENEVE
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« A Bologne, [...] la justice laisse à désirer. L. Macchiavelli, auteur d'un réjouissant roman, y lâche son héros aux intestins capricieux, le sergent Sarti Antonio. [...] Magouilles politiques, traites d'immigrés, crimes crapoteux, police véreuse : les entrailles de la ville rose sont noires d'horreurs. Très pince-sans-rire, Loriano Macchiavelli batifole avec insolence, malmène son héros, se moque de lui (il faut dire qu'il fonctionne parfois au ralenti, ce qui le rend sympathique). »Martine LavalTELERAMA
Ceux qui s'y connaissent affirment que toute histoire doit prendre le lecteur aux tripes dès le début. Pour ce qui est des histoires situées à Bologne, pas besoin d'un gros effort d'imagination car Bologne est et a toujours été un lieu de mystère idéal. La ville est faite pour. Architecturalement, je veux dire. On découvre même aujourd'hui qu'elle a un sous-sol, plus mystérieux et plus secret encore, parce que peu de gens le connaissent et que la mémoire historique s'est perdue et avec elle celle de notre passé et celle de notre avenir. Mais tout le monde s'en fout. Imaginez qu'il y en a même qui, de nos jours, ne savent pas que la rue Riva di Reno s'appelle ainsi parce qu'au milieu courait un canal, entre deux rues qui le longeaient. Un canal qui s'écoule toujours sous nos pieds, bordé tout du long par des bassins où les lavandières gagnaient leur croûte. Et une arthrose avant leurs vingt ans. Un beau jour, au réveil, j'ai découvert que le canal avait été recouvert; des siècles d'histoire, de travail et d'arthrose avaient été enfouis. Pour un parking d'une inutile utilité. Mais peut-être est-ce bien ainsi: mieux vaut cacher le passé, qui n'est jamais aussi beau qu'il y paraît quand il est le passé ou qu'il fait partie du futur. Et puis, voilà qu'aujourd'hui un nouveau génie de l'urbanisme est arrivé qui, après avoir longuement réfléchi, a décidé que remettre au jour le canal de la rue Riva di Reno constituerait une réhabilitation de notre passé, de notre culture, de notre histoire. Comme si tout cela intéressait quelqu'un! Mais faire et défaire, c'est toujours travailler, comme on dit, enfin comme on disait, dans ma région.
Mais revenons-en aux histoires qui doivent prendre le lecteur aux tripes dès le début. La mienne va forcément y arriver car elle commence par un mort, le mort du canal Navile, retrouvé à l'écluse du Battiferro, dans la banlieue nord de Bologne.
Un peu en amont de l'écluse, une espèce de digue de briques et de ciment sépare en deux le cours du canal. Une partie des eaux prend à gauche, longe un bâtiment en briques sur lequel est inscrit "Génie civil - maison de manœuvre", puis continue vers Ferrare; l'autre passe à droite devant une construction où c'est marqué "Port de départ" et sur la façade de laquelle se trouve une niche avec à l'intérieur une vierge à l'Enfant au-dessus des insignes de l'État pontifical, à savoir les clés, la tiare, les trois couronnes et la croix. L'eau y finit sa course contre une paroi en fer, y bouillonne sous l'effet de la vitesse, est repoussée en arrière avant de venir battre à nouveau dans un mouvement qui semble sans fin. C'est contre cette même paroi que finissent également tous les détritus qui ne prennent pas directement la direction de Ferrare et de la mer et c'est là, qu'aujourd'hui, il y a un cadavre. Il se cogne, s'éloigne et se recogne, disparaissant sous les eaux puis réapparaissant. Un vrai massacre.
Ce sont deux gosses qui jouent sur la digue, là où le canal s'écoule à ciel ouvert loin de la ville, qui le voient les premiers.
Les deux gamins regardent pendant un moment le mouvement du corps désarticulé, puis courent tout raconter à leurs mères qui sont certes des déclassées, mais qui ont la télé et le téléphone. Voilà comment la voiture 28, avec à son bord Sarti Antonio, sergent de son état, et Cantoni Felice, agent de son état, se pointe avant tout le monde sur les lieux. C'est pas la première fois que la voiture 28 se trouve à deux pas de là où sont arrivés, arrivent et arriveront des événements peu sympathiques. Que voulez-vous, c'est le tragique destin de mon policier.
Ce premier cadavre fait partie de cette catégorie d'événements qui, au moment où ils se manifestent, se présentent à vous comme indépendants les uns des autres. Mais lorsque vient le moment de la conclusion, vous vous apercevez que ce qui se passe, dans la vie comme dans la mort, est le résultat d'un projet dont, dans le meilleur des cas, la fin vous échappe et souvent, aussi le début. Alors vous vous demandez ce que vous foutez là et vous avez envie de tout laisser tomber et d'aller bêcher votre jardin.
À première vue, ce cadavre avec trois balles dans la peau n'a rien à voir avec les faits survenus ces derniers temps à Bologne, où il est arrivé de tout, même des événements qui paraissaient impossibles, comme le basculement à droite de la municipalité. Personne ne s'en est aperçu et tout continue à fonctionner aussi mal qu'avant.
Pour ce que j'en savais, l'écluse du Battiferro avait toujours existé. Mais en faisant quelques recherches, indispensables pour continuer mon histoire, j'ai découvert que c'était une des trois écluses navigables construites par le Milanais Pietro da Brambilla entre 1491 et 1494, puis refaite par Vignole en 1548. Autour s'élevèrent plusieurs usines: le martinet du batteur de cuivre, une fabrique de papier, une centrale hydraulique de 1901 et la briqueterie Gallotti de 1886. Un ensemble d'équipements qui rendaient navigable le canal Navile, quand navigation il y avait. Aujourd'hui c'est bien fini, mais l'écluse du Battiferro est toujours là, dans un vallonnement; et on ne la voit que si l'on y descend. Elle est habitée par quelques laissés-pour-compte, deux familles du Sud, des immigrés clandestins, des clochards, dont notre bon vieux Settepaltò et autres individus sans état civil qui n'ont rien trouvé de mieux et auxquels un simple toit suffit en attendant que quelqu'un se souvienne de l'existence, dans la banlieue de Bologne, de cette écluse, la mette en valeur, chasse ces pauvres types et la transforme en un centre résidentiel à six millions de lires et des poussières le mètre carré, avec supermarché attenant.
Les grosses barques qui venaient de Ferrare et de l'Adriatique abordaient et transitaient par cette écluse. Elles amenaient des voyageurs de Venise et alentour, du sel de Cervia, du ciment, du sable et autres marchandises jusqu'au début de la Seconde Guerre mondiale. Ce qui n'est pas très vieux. Pas encore, du moins.
Pendant l'occupation allemande, les Fritz (eux, ils savaient la faire, la guerre) avaient de nouveau rendu navigable le canal Navile et remis en service le port du Battiferro; ils l'utilisaient pour transporter des armes et des munitions sur des barques que les avions des alliés ne parvenaient pas à voir, noyées qu'elles étaient dans la végétation des berges.
Un peu plus loin, sur les pentes, il y a encore les anciennes briqueteries ainsi que les maisons des ouvriers qui travaillaient autrefois à la préparation et à la cuisson des briques. Un travail de bête. Un travail de merde. À croire que ça a toujours existé: le travail, les ouvriers, les briques, la merde.
Une passerelle en fer rouillé branlante lie les deux berges du canal, le bâtiment du génie civil et celui de l'État pontifical, autrement dit le sacré et le profane.
Tandis que je vous raconte ce moment de notre histoire, les sapeurs-pompiers repêchent le corps et Sarti Antonio décide d'aller faire un tour du côté de l'écluse à la recherche d'informations.
- Tu viens avec moi?
L'agent Felice Cantoni répond d'un ton décidé:
-Je reste ici. Il faut bien qu'un de nous deux reste, non?
-Pour quoi faire?
-D'abord, parce que les pompiers pourraient avoir besoin de nous et puis, parce qu'il faut tenir la foule loin du lieu du crime.
En réalité, il reste parce qu'il a trop peur que tous ces gens autour de lui ne bousillent la voiture 28. Ce qui est déjà arrivé.
-Comme tu veux.
Sarti Antonio commence son enquête par les deux gamins qui ont découvert le cadavre. L'un s'appelle Vando - ses parents attendaient probablement une fille qu'ils avaient décidé d'appeler Vanda, mais c'est Vando qui est né -, il a dix ans.
-Alors, jeune homme, raconte-moi ce qui s'est passé?
-Rien, on l'a vu, c'est tout.
-Et vous étiez où quand vous l'avez vu?
-Là, sur la digue.
-Vous y allez souvent sur la digue?
-Tous les jours.
-Hier aussi?
-Oui, hier après-midi.
-Et lui (Sarti Antonio indique le corps que les pompiers ont étendu sur l'herbe et qu'ils recouvrent d'un drap), vous l'avez vu hier?
-Non, y était pas.
-T'en es sûr?
-Ouais!
-T'as vu quelqu'un rôder sur la digue?
-Non, ce matin on était tout seuls, Pedro et moi.
-Vous êtes pas allés à l'école?
Vando le regarde avec surprise et doit sûrement penser que si tous les flics sont comme lui, c'est grave.
-Mais on est dimanche!
Pour le sergent Sarti Antonio, que ce soit dimanche ou lundi, c'est du pareil au même.
L'autre garçon s'appelle Pietro, Pedro pour ses amis du Battiferro, mais il n'est plus sur les lieux. Lui aussi a dix ans. Sa mère, anxieuse comme toutes les mères qui ont une vie pénible et qui tâchent de rendre celle de leur fils moins difficile que la leur, l'a ramené tout de suite chez elle où elle va le surveiller pendant Dieu sait combien de temps. Au moins jusqu'à ce que Pedro ait oublié cette horrible histoire du cadavre dans le canal!
- Où il habite, Pedro? demande enfin le sergent Sarti Antonio à Vando.
Ce n'est pas très loin.
La mère de Pedro est suspicieuse et regarde mon policier avec méchanceté:
- Qu'est-ce que vous lui voulez?
Elle ne bouge pas d'un millimètre du seuil qui donne directement sur la rue. Une de ces petites bâtisses, avec un rez-de-chaussée et un étage, deux pièces par étage, que quelqu'un avait dû construire autrefois comme dépôts et qui sont devenues avec le temps des habitations.
La femme a la trentaine passée, les cheveux châtains. Elle est grande et maigre juste ce qu'il faut. Elle est habillée avec simplicité mais a l'aspect propret des femmes qui n'ont pas les moyens de paraître plus belles qu'elles ne le sont. Pour Sarti Antonio, ça peut suffire et, d'ailleurs, il réussit même à lui sourire. Je ne me souviens pas de la dernière fois que ça lui est arrivé.
- Ne vous inquiétez pas, madame, je sais parler aux mômes. Je ne lui demanderai rien qui puisse le perturber.
Est-ce pour le sourire ou parce qu'elle est encore bouleversée par ce qui vient d'arriver à son gosse, le fait est que la femme s'écarte et laisse entrer le policier. Elle a besoin de se détendre, de trouver un soutien, et Sarti Antonio lui semble le type qu'il faut.
Pedro, assis à la table, est tout triste. Il tient sa tête entre ses mains sous le menton.
- Comment ça va, mon garçon?
-Ça va qu'elle veut pas que j'sorte et que tous les autres regardent la police et les pompiers.
-T'en fais pas, tu perds rien. Et puis, si c'était moi qui te racontais tout? Hein? Tu te rends compte que toi, la police, tu l'as chez toi?
Pedro change d'expression.
-Raconte-moi ce qui s'est passé exactement ce matin.
Sarti Antonio sourit de nouveau à la mère qui lui demande, conquise
-Vous voulez un café?
-Je ne dis jamais non.
-Moi non plus.
Cette fois, c'est elle qui sourit timidement avant de se mettre aux fourneaux.
-Et je le fais plutôt bien.
-C'est votre mari qui en a, de la chance.
Elle hoche la tête et Sarti Antonio laisse tomber, même si l'expression de la femme lui a fait naître un espoir. De nouveau au gamin:
-Alors, qu'est-ce que tu me dis, mon garçon?
Illui raconte plus ou moins la même histoire que Vando. Et Sarti Antonio se retrouve avec les mêmes éléments inutiles. L'odeur du café qui monte le fait revenir à la maîtresse de maison.
-Vous aviez raison, il a l'air très bon. Et je m'y connais, croyez-moi.
Ils boivent en silence, puis:
-Qu'est-ce qui va arriver, maintenant? demande la mère avec anxiété.
-À Pedro, rien, soyez tranquille...
-Mais comment vous voulez que je reste tranquille? Il a couru à la maison pâle comme... pâle comme...
Elle voudrait dire "comme un mort", mais elle n'y arrive pas.
-Vous vous inquiétez pour rien, madame. Les gosses comme Pedro s'en sortent vite et bien. Vous savez ce qu'on va faire? Je vais l'emmener avec moi.
-Vous n'allez pas... vous n'allez tout de même pas le ramener sur la digue?
-À cette heure-ci, il n'y a plus rien à voir, soyez tranquille. Les pompiers ont récupéré le corps et l'ambulance l'a déjà évacué. Non, on va aller faire un tour dans les environs en espérant trouver quelqu'un d'utile pour l'enquête.
-L'enquête! crie Pedro. Laisse-moi y aller, Federica!
Ilne l'a pas appelée maman. Et Sarti Antonio sait désormais comment elle s'appelle. Pedro sort sans avoir attendu la permission.
-Qui c'est qui habite le plus près de l'écluse?
-Deux Marocains, mais y sont pas chez eux. Ils y sont jamais.
Deux Marocains! Tiens, son ancien chef, Cesare Raimondi, écarté du commissariat de Bologne après l'affaire de la Fiat Uno blanche, aurait déjà trouvé qui soupçonner. Mais, heureusement, mon policier ne voit pas ça comme ça.
-Alors, tu sais ce qu'on va faire? On va y aller au petit bonheur la chance.
Mais il n'est pas très chanceux et il ne trouve rien. Pourtant, un coup de feu, ça devrait s'entendre, d'une part parce que dans le coin il n'y a pas de circulation, d'autre part du fait de la topographie des lieux, un vallonnement qui devrait faire caisse de résonance. Mais à Bologne, désormais, c'est comme à Palerme:
personne n'entend rien et personne ne voit rien. Le cadavre du canal Navile n'en est q'un parmi tant d'autres auxquels nous sommes tout simplement en train de nous habituer. On se demande ce qui arrive ou a bien pu arriver à cette ville, dépeinte couramment comme très civilisée et très démocratique. Du baratin, tout ça!
Tandis que Sarti Antonio ramène Pedro dans sa famille, il lui demande:
-Il est où, ton père?
- Pff!
-Ça veut dire quoi, pff? Tu sais pas où il est?
-Lui, ça fait des années que j'le vois pas.
-Il travaille à l'étranger?
Pedro hausse les épaules. Ou il ne le sait pas, ou il s'en tape.
-Et ta mère, qu'est-ce qu'elle fait? Elle a un travail?
Le garçon acquiesce, mais ne répond pas.
-Alors, qu'est-ce qu'elle fait?
-Pff!
-Encore! Tu sais pas ce qu'elle fait?
-Je sais juste qu'elle part le soir et qu'elle revient le matin, avant que j'aille à l'école.
On est bien avancé avec ça! Sarti Antonio laisse tomber la conversation parce que le premier boulot qui lui traverse l'esprit et qui ait cette caractéristique, c'est le métier de pute.
Ilrend le gosse à sa mère et se laisse offrir un autre café.
-Vous avez réussi à savoir qui... qui c'est... qui c'était, ce pauvre homme?
Sarti Antonio secoue la tête.
-Et vous allez faire quoi maintenant?
C'est Pedro qui lui répond:
-Maintenant, il va faire une enquête. T'as bien vu comment ils font à la télé, non?
-C'est pas vraiment la même chose, Pedro. Tu vois, moi je sais pas par où commencer alors qu'à la télé, ils savent toujours.
Le garçon est déçu et mon policier tente de se rattraper.
-Mais tu sais, je suis mieux que Colombo, moi!
Puis il s'adresse à la mère:
-On a l'impression qu'ici tout le monde est aveugle, sourd et muet!
-Personne ne veut d'ennuis.
-Bien sûr... moi non plus j'en voudrais pas.
Ilpose sa tasse.
-S'il m'arrive de repasser dans le coin, je m'arrêterai pour un autre café.
-Quand vous voulez.
-À quelle heure vous êtes chez vous?
-J'y suis presque tout le temps.
-Quelle chance de ne pas travailler!
Federica hausse les épaules et mon policier laisse tomber une nouvelle fois la conversation.
-Au fait, je ne sais toujours pas comment vous vous appelez, dit Federica.
-Oh, pardon. Sarti Antonio.
Il ajoute sur le pas de la porte:
-Laissez sortir votre fils, il n'y a aucun danger. À son âge, il a besoin de bouger.
-Je sais, je sais. Si seulement son père était là...
Felice Cantoni le voit arriver et crie:
-T'en as mis du temps, Tonio! On se les gèle ici!
-J'ai mis le temps qu'il fallait et si t 'étais venu avec moi, t'aurais profité d'un bon jus et de la compagnie d'une nana pas mal du tout.
-Ah ouais? Et comment elle est? Hein?
-Elle est qu'elle est pas pour toi.
Il monte dans la voiture 28.
-Alors, on part ou on prend racine dans cette saloperie de bagnole?