Publication : 26/09/2003
Pages : 360
Grand Format
ISBN : 2-86424-481-0

Le Fanatique

James ROBERTSON

ACHETER GRAND FORMAT
18.5 €
Titre original : The Fanatic
Langue originale : Anglais
Traduit par : Yves Bouveret

Au printemps 1997, Andrew Carlin, ancien étudiant en histoire, libraire raté et dépressif, est engagé comme fantôme pour animer la visite guidée des vieux quartiers d'Edimbourg. Il doit apparaître brusquement devant les touristes et incarner un extrémiste religieux condamné au bûcher pour inceste et bestialité en 1670.
Obsédé par son personnage, Carlin se lance dans des recherches historiques et trouve la trace de James Mitchel, un protégé de son personnage, un "fanatique" emprisonné au Roc de Bass en 1674 pour tentative d'assassinat sur l'évêque de Saint-Andrews. Carlin, fasciné, s'enfonce dans ce passé obscurantiste où le fanatisme presbytérien et la corruption du gouvernement mènent également la chasse aux sorcières et où les bûchers empuantissent les villes. Il glisse de la curiosité à l'identification et à la folie.

Roman époustouflant sur le passé, l'identité et la rédemption, Le Fanatique nous entraîne dans une histoire faite de trahisons, d'assemblées secrètes, de voyages clandestins, d'identités masquées, à la suite d'un protagoniste qui ne reprend pied dans la période contemporaine que pour y retrouver son angoisse et son incapacité à vivre.

"La preuve éclatante d'un talent multiple et plein d'énergie."

<p style="margin-right: 150; margin-top: 0; margin-bottom: 0" TLS

  • On ne joue pas impunément au fantôme. Surtout quand on incarne l'un de ces fanatiques qui finissent sur l'échafaud dans l'Ecosse du XVIIè en proie aux querelles religieuses. Andrew, un ex-étudiant en histoire plutôt déprimé, participe à des visites guidées d'Edimbourg, déguisé en fantôme pour épater le touriste. En jouant le rôle, il ne se doutait pas qu'au cours de ses recherches historiques il allait plonger dans un univers dont la violence le mènerait au dédoublement et à la folie. Un sombre face-à-face entre un homme à la dérive et les relents d'un passé obscurantiste.
    Alexis Liebart
    MARIANNE

PROLOGUE

(ROC DE BASS, Mars 1677)

James Mitchel rêvait. Son rêve était de ceux qui se moquent du rêveur, qui le font douter constamment de la réalité ou de l'irréalité de ce qu'il rêve.

Dans ce rêve, il était éveillé, étendu sur un lit. L'air de la pièce était chargé d'une lourde odeur de femme. Il sentait monter en lui une grande tristesse. étendu dans la lumière naissante, il sentait la tristesse monter du fond de ses entrailles, une sensation physique qui envahissait sa poitrine et lui nouait la gorge au point qu'il lui semblait qu'il allait devoir pousser un cri. Mais il se retint car il ne voulait pas la réveiller. Elizabeth. Oui, c'était bien elle, il entendait sa respiration régulière. Il entendait aussi son propre souffle, la friction de l'air contre les poils de ses narines :  le son lui paraissait à la fois venir de lui et ne pas venir de lui. Comme le son de votre voix lorsque vous vous enfoncez les doigts dans les oreilles. Le bruit de la mer dans un coquillage.

L'aube se glissa dans la pièce. Il étendit la main pour toucher Lizzie mais ne trouva que la froide pierre. Soudain il fut réveillé, pleinement réveillé. Il tourna la tête ; elle n'était pas là. Il sut alors qu'il ne lui serait plus jamais donné de la toucher. Mon bien-aimé a passé la main par la fente de la porte et pour lui mes entrailles ont frémi Il aurait voulu hurler ou tout simplement pleurer en silence, mais sa gorge nouée ne lui permettait d'émettre qu'un gémissement.

Il était étendu dans une cellule minuscule, humide qui sentait le sel et l'urine. La lumière du jour avança faiblement puis renonça. Son lit était une plate-forme de bois pressée contre la pierre. Il était seul. Sa jambe droite lui élançait.

Il s'assoupit de nouveau. Il voyait maintenant en rêve un visage mauvais qui le fixait, le visage d'un évêque, méprisant et glacial sous sa calotte noire. Mitchel, refusant de plier, soutenait son regard. Mais voici qu'une autre forme apparaissait, plus sombre, plus grande, revêtue d'un capuchon percé de trous pour les yeux.

Cette forme tendait la main vers lui presque tendrement, soulevait sa jambe droite par la cheville et l'allongeait comme on fait avec un mort. Mitchel serra les dents. Il était assis sur une chaise, les bras attachés derrière lui, la jambe prise dans des planches qui l'enserraient comme un arbuste en pot. L'homme au capuchon se retourna puis lui fit de nouveau face : il tenait une masse à tête de fer d'une main et de l'autre un coin de bois.

La jambe eut une convulsion et Mitchel se réveilla de nouveau. Il se mit sur son séant. De l'autre côté du mur il entendait un homme qui lisait les Psaumes : Oh mon Dieu, mon âme est sur moi défaillante ; alors je me souviens de toi depuis la terre du Jourdain... l'abîme appelant l'abîme au bruit de tes écluses, la masse de tes flots et de tes vagues a passé sur moi. Le jour Yahvé mande sa grâce et même pendant la nuit le chant qu'e/le m'inspire est une prière à mon Dieu vivant.

Mitchel se rappela où il était. Il s'appelait maître James Mitchel, prédicateur, précepteur, soldat et épée du Christ, prisonnier du roi. Ses ennemis lui donnaient d'autres noms  fanatique, manant enthousiaste, rebelle félon, assassin. On l'avait torturé pour lui faire confesser un crime qui pour lui n'en était pas un mais un acte commis au service du Christ. Sa femme Elizabeth se trouvait à quinze milles de là, à Édimbourg. Il était incarcéré dans la puante prison du Roc de Bass au large de la côte orientale de l'Écosse et il n'avait pas l'espoir de recouvrer un jour sa liberté.

Il partageait le Roc avec une douzaine d'autres, eux aussi du parti de Dieu mais ils ne souhaitaient guère lui parler. Certains le tenaient pour sot, buté, ignorant, et d'autres le blâmaient d'avoir si bien provoqué le gouvernement que celui-ci avait déchaîné son courroux sur leurs têtes. Il était à Bass depuis deux mois et s'il n'y restait pas jusqu'à sa mort, ce serait seulement parce qu'on viendrait le chercher pour l'exécuter à Édimbourg.

Sa jambe n'était qu'un membre estropié. Sous la torture des brodequins elle avait été si terriblement mutilée qu'elle n'était maintenant plus guère pour lui qu'une gêne. Plus d'une année plus tard, il ne pouvait s'appuyer dessus qu'à peine. Les plaies externes s'étaient refermées, plus ou moins, mais l'intérieur restait en bouillie. Elle lui était si peu utile qu'il s'en serait volontiers passé mais elle refusait de le laisser en paix. La douleur lancinante l'assaillait à toute heure du jour ou de la nuit puis cessait comme elle était venue. C'était comme être pris dans les mâchoires d'un chien que la faim réveillait de temps en temps et qui le rongeait comme s'il n'était plus que de la viande et de la moelle.

Il avait subi neuf coups de maillet. Ce nombre était enfoncé dans sa mémoire comme autant de clous dans une porte de chêne. Parfois, la nuit, il s'éveillait en sueur d'un rêve dans lequel il était enfermé dans un cercueil, incapable de se mouvoir, tandis qu'un serviteur du diable l'ayant ainsi transporté comme un mort-vivant frappait neuf coups perçants à la porte de l'enfer. Bien que Mitchel sût qu'il n'était pas destiné à ce lieu mais au paradis, le souvenir enfonçait des aiguilles de feu dans sa jambe meurtrie.

L'ironie du sort avait fait que l'homme par qui la souffrance était advenue, l'homme à la calotte noire, n'assistait même pas à sa torture. James Sharp, archevêque de Saint-Andrews, était à Londres ce jour-là mais Mitchel ne l'en tenait pas quitte pour autant. Nul homme ne pouvait être honni de tout un peuple autant que Sharp. Ce ministre de Crail qui avait si résolument lutté, en apparence, pour défendre le Covenant de l'Écosse avec Dieu, qui avait été envoyé par l'Église d'Écosse pour négocier avec le roi Charles l'année de sa restauration et s'assurer que le presbytérianisme serait maintenu, qui était allé à Londres pour abattre les évêques et qui était revenu archevêque... Judas Sharp, traître parmi les traîtres. Lors de la torture de Mitchel, certains membres de la commission de juges et conseillers chargés de l'interrogatoire avaient caché leur visage lorsqu'on l'avait traîné devant eux dans la salle voûtée, sous le Parlement d'Édimbourg. Ils craignaient des représailles si ses coreligionnaires venaient à apprendre leur identité, ou leur conscience leur reprochait leur propre turpitude, ou pour ces deux raisons à la fois. Pour Mitchel, Sharp n'était pas plus absent de la chambre de torture que Ces autres n'étaient rendus invisibles par la main qui cachait leurs yeux. Si Saint-Andrews lui même avait enfoncé les coins à la place du bourreau, sa présence n'eût pas été plus évidente.

Sharp aurait dû mourir et Mitchel rester libre. Mitchel avait eu l'occasion de le tuer neuf ans auparavant mais quelque chose, sa propre hésitation ou le doigt de Dieu qui fit dévier son tir, l'avait fait échouer. La colère de Mitchel venait en partie de ce qu'il ne savait toujours pas laquelle de ces deux causes était la bonne.

De l'autre côté du mur la voix entamait le Psaume suivant :

Juge-moi, O mon Dieu, et p/aide ma cause contre une nation impie: O délivre-moi du fourbe et de l'injuste. Mitchel aurait volontiers dit amen à cela mais celui qui lisait était le ministre de Brea, James Fraser, reconnaissable à son accent du Nord et Fraser, bien qu'il eût été amené par les mêmes gardes que lui d'Édimbourg, était resté froid et distant vis-à-vis de Mitchel parce qu'il trouvait suspecte son interprétation des Écritures. Fraser était noble, le fils d'un hobereau des Hautes Terres. La peste l'étouffe !  pensa Mitchel.

Il concentra son attention sur sa jambe : il prit son genou dans les longs doigts osseux de ses deux mains et le comprima de toutes ses forces. Parfois il parvenait à chasser la douleur vers le bas de cette façon. Il ne comprenait pas pourquoi cela marchait, attendu que la lésion se situait au genou et au-dessous, il ne se rappelait pas non plus comment il avait appris ce moyen de mater sa jambe indocile. Il avait tout essayé cependant, et à force de tâtonnements ses mains étaient devenues de plus en plus expertes. Parfois, sarcastiquement, il lançait à voix haute, comme un prédicateur excommuniant un satané royaliste : Jambe enragés. tu es une chienne d'apostate. En imagination il voyait sa jambe, au jour du Jugement dernier, jetée dans les flammes de l'enfer tandis que lui s'élevait à cloche-pied vers le ciel. Parmi les saints il faisait figure d'un saint moins que parfait.

Il ne trouvait pas blasphématoire d'imaginer cette scène pour tenter d'endiguer les vagues de douleur que sa jambe lui causait. A vrai dire, la pensée de se singulariser au paradis lui plaisait fort. Là-haut on rendrait hommage à ses souffrances. Le Christ connaissait sa fidélité : Jésus savait qu'il croyait en Sa parole et, amputé ou non, il retrouverait son corps glorieux entier au royaume des cieux.

Tous les vrais enfants du Christ vont au ciel le front sanglant et les jambes brisées. Il se souvenait de cela. C'était une phrase d'un livre qu'il avait autrefois eu en sa possession, les lettres de Samuel Rutherford, livre honni du gouvernement et brûlé par le bourreau pour sa parfaite intégrité. Mitchel avait perdu son exemplaire depuis longtemps, mais il l'avait aimé passionnément et il en connaissait encore des passages entiers de mémoire. Rutherford était pour lui comme une seconde bible. Il trouvait une sorte de réconfort ironique dans cette phrase. Il avait déjà la jambe brisée : le front serait sanglant dans bien peu de temps.

Il enserra ses épaules de ses bras et tenta de lutter contre le froid. Il lui semblait que la mer elle-même s'était insinuée dans ses os. Dehors, les fous de Bassan s'égosillaient. Le Roc en hébergeait des milliers. Ils étaient arrivés de leurs mystérieux hivernages, l'Afrique selon certains, à peu près en même temps que Mitchel. L'air retentissait des cris stridents qui accompagnaient leur vol circulaire ou leurs piqués selon qu'ils construisaient leur nid ou plongeaient sous la surface de la mer à la poursuite de leur proie. Il se rappela sa vision du Roc dans le bateau qui l'amenait, ses flancs souillés de longues traînées d'excréments, ses falaises crépies de fiente blanche et verte depuis des siècles. A son pied, là où avaient été taillées dans le roc les marches de l'escalier conduisant aux bâtiments de la prison, le ressac faisait alterner des bruits de succion et de renvois. D'Édimbourg, on l'avait transféré un an après qu'il eût subi la torture. Une troupe de douze cavaliers et trente fantassins l'avait escorté jusqu'ici avec James Fraser, par un jour glacial de la fin janvier. Les soldats l'avaient hissé hors du bateau  ;  ils l'avaient porté sous les aisselles pour gravir les marches puis ils l'avaient jeté tremblant de froid et de fièvre, une couverture pour toute protection, dans ce cachot.

La première semaine les autres prisonniers avaient tenté de soigner sa jambe et de lui rendre des forces, mais ils ne pouvaient offrir guère plus que leurs prières. En haillons, le visage couleur d'ardoise, le corps à bout de forces, squelettiques, ils se tenaient courbés comme les cerisiers rabougris giflés par les vents incessants qui poussaient tout en haut du Bass. Puis ces hommes s'étaient écartés de lui peu à peu parce qu'ils ne pouvaient pas comprendre la violence de ses convictions. Mitchel savait qu'ils le considéraient comme plein d'amertume et peut-être détraqué. Mais leur faiblesse le laissait insensible : il avait seulement porté à leur conclusion logique les principes qu'ils professaient tous : le droit du peuple de Dieu de résister à une domination impie, le devoir pour l'Écosse de Dieu de défendre le Covenant contre les blasphèmes des prélats. Ce qu'ils voulaient conjurer, c'était leur propre couardise : ils avaient peur de frapper le juste coup, d'être le glaive du Seigneur et de Gédéon.

A cause de sa jambe, il avait passé presque les deux mois entiers dans son cachot, sans pouvoir se lever. Il était impossible de s'évader de Bass : les falaises étaient à pic et, sur trois côtés, n'offraient pas le moindre recoin où l'on pût aborder. Quant au quatrième, il était puissamment fortifié au seul endroit où un bateau, par temps calme et marée favorable, pouvait s'approcher du rivage : aussi les prisonniers pouvaient-ils, seuls ou deux par deux, parcourir le rocher à leur guise. Mais ceci ne présentait pour lui aucun intérêt du fait de son infirmité. De toute façon, il était soumis à un régime spécial, plus sévère.

Certains autres, par beau temps ou même lorsque le vent fouettait la pluie glaciale, passaient plus de temps à divaguer parmi les fous de Bassan qu'à fréquenter leurs semblables. Alexander Peden, le prophète de Galloway, était là depuis presque quatre ans, et Alexander Forrester et William Bell, arrêtés pour prédication sauvage à Fife et dans les collines de Pentland, depuis presque aussi longtemps ;  James Fraser était arrivé à bord du même bateau que Mitchel, suivi de peu par un autre ministre du Nord, Thomas Hogg de Kiltearn, et d'un homme du nom de George Scot, arrêté pour avoir donné asile à des ministres fugitifs ; et il y avait aussi un certain Robert Dick, marchand, organisateur et participant du conventicule de Pentland auquel William Bell avait prêché. Ensemble ou seuls, parmi les oiseaux qui picoraient et ondoyaient comme un champ d'orge mûr agité par le vent, ces hommes pouvaient voir l'autre rive de cette mer infranchissable et rêver de la traverser. La plaisanterie habituelle des soldats était que les ministres pouvaient apprendre des oiseaux comment gémir et prêcher de sorte que s'ils rentraient jamais en Écosse ils sauraient assommer le pays tout entier de leurs patenôtres.

Les criailleries des fous ne cessaient jamais. Il semblait parfois à Mitchel qui ne pouvait se déplacer que jusqu'à sa porte que sa cellule était le seul endroit qui ne fût pas envahi par les oiseaux. Un esprit dérangé pouvait croire que le vacarme était dans sa tête. Plusieurs fois par jour, Mitchel faisait un effort pour séparer les cris des oiseaux blancs de ses pensées, pour leur reprendre son esprit.

Car dans ses rêves, outre l'évêque à la calotte noire et le bourreau encapuchonné, une troisième figure le hantait, un vieil homme, prisonnier lui aussi. Mitchel s'absorbait dans ses prières et sa bible car lorsque son esprit divaguait ce vieil homme approchait. Il avait de longs cheveux blancs collés par les embruns et la peau de son visage semblait avoir été tannée par le sel au fil des ans. Tant d'années que Mitchel souffrait d'y penser. Il avait peur du vieillard, du doute et du dégoût de soi qu'il lisait dans son regard voilé. Il le connaissait : ce n'était pas lui-même mais il avait peur de finir comme lui.

Parfois, lorsque le temps était mauvais, les vivres ne pouvaient pas être acheminés de North Berwick pendant une semaine ou plus. En février les prisonniers, et les soldats qui les gardaient, en avaient été réduits à mêler de l'avoine à la neige et à mâcher du poisson séché. Les soldats attrapaient de temps en temps des poissons : ils les clouaient à des planches attachées à des cordes qu'ils mettaient à la mer au pied des falaises. Un fou de Bassan en piqué repérait le hareng et se fichait dans le bois. On le ramenait pour le faire rôtir mais ces oiseaux adultes, âgés parfois de plus de vingt ans, donnaient une viande coriace et huileuse. Mieux valait manger le poisson.

A la fin de l'été, les hommes attrapaient les oisillons lorsqu'ils étaient bien gras et bien tendres mais encore incapables de prendre leur volée. On en prélevait ainsi des centaines qu'on envoyait à Londres où ils étaient appréciés comme un mets délicat, sans qu'on vît décroître la population de la colonie. Lorsque les chasseurs s'affairaient avec leurs filets au sommet du Roc ou lorsqu'ils se laissaient descendre au bout de cordages pour assommer les oisillons et les jeter à la mer où d'autres hommes attendaient pour les jeter dans une barque, on eût cru assister à la moisson des âmes par les serviteurs de Satan.

Le capitaine de la garnison gérait ce commerce pour le compte du gouverneur moyennant un salaire annuel et un pourcentage sur les bénéfices. Le gouverneur était le secrétaire d'État pour l'Écosse, John Maitland, duc de Lauderdale. La chasse aux fous de Bassan rapportait environ quatre-vingts livres par an. Ceci mis à part, ni le duc ni personne ne se souciait de la façon dont le capitaine exerçait par ailleurs son autorité. S'il le souhaitait, le capitaine pouvait maintenir les prisonniers enfermés dans leurs cellules et leur refuser l'accès aux pauvres sentiers qui s'entrecroisaient et qu'ils partageaient avec les oiseaux et quelques moutons galeux qui paissaient au sommet du Roc. Il pouvait interdire les prières en commun ou les visites d'amis ou de parents dont certains devaient faire des jours entiers de voyage pour atteindre North Berwick. Il n'y avait pas de règles établies ni d'instance supérieure à laquelle les prisonniers eussent pu s'adresser : la forteresse de Bass se dressait en vue de la côte d'Écosse aussi imprenable, aussi indifférente au bien-être des hommes qu'un château dans la lune.

James Robertson est l’auteur de deux recueils de nouvelles, deux livres de poésie et d’un recueil sur les fantômes écossais. Le Fanatique, premier titre traduit en français, est son premier roman.
Il vit dans le Fife en Ecosse.
Son roman Joseph Knight a reçu les deux prix les plus importants d’Ecosse en 2004, The Saltire Award et The Scottish Arts Council Award.

Bibliographie