Publication : 11/04/2013
Pages : 350
Grand Format
ISBN : 978-2-86424-914-6
Couverture HD

Le deuxième vœu

Ramon DÍAZ-ETEROVIC

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18 €
Titre original : El Segundo deseo
Langue originale : Espagnol
Traduit par : Bernardo Toro

« J’ai passé une grande partie de ma vie à chercher des réponses aux questions que d’autres se posaient et je désire maintenant résoudre le seul mystère qui me concerne totalement. »
Chargé de retrouver un vieillard dont plus personne n’a de nouvelles, Heredia, l’orphelin, reçoit une lettre qui lui rappelle le vœu de sa mère, qui depuis le passé le pousse sur les traces de l’homme qui pourrait être son père et qu’il n’a jamais connu.
Menant en parallèle ces deux enquêtes, deux mystères, il est confronté à la réalité de l’abandon, ainsi qu’aux pièges de la mémoire.
Heredia, archétype du privé, avec son costume fripé et sa vieille voiture, se comporte en moderne don Quichotte « redressant les torts et faisant régner pour les êtres du commun une justice qu’autrement ils n’atteindraient jamais ».
Un des meilleurs romans de la série policière la plus populaire d’Amérique latine.

  • « Réflexions sur la vie et intrigue bien ficelée font de ce polar un agréable compagnon de route. »
    Paris Normandie et le Havre Libre
  • « Il faudra un jour élever un petit autel à Hérédia, le détective privé de Ramon Diaz-Eterovic, qu’on accompagne maintenant depuis une dizaine d’années dans ses enquêtes…» Plus d'infos ici.
    Benjamin Berton
    Site web Fluctuat
  • « Ramon Diaz-Eterovic le revendique, ses romans noirs sont avant tout des critiques sociales. Et leur réalisme prend aux tripes. » Plus d'infos ici.
    Sandrine Martinez
    Myboox.fr
  • « Nous sommes tous des Heredia, perdus entre sentiments et raison, entre tendresse et mélancolie, nous avons tous un peu du pragmatisme du chat, Simenon. Ce beau roman très abouti nous le rappelle de façon magistrale. » Plus d'infos ici.
    Louise Laurent
    Site web Espace Latinos
  • « Chaque roman de Díaz-Eterovic est en fait une façon de prendre le pouls des relations humaines, d’en mesurer le délitement. » Plus d'infos ici.
    BLOG La Cause littéraire
  • « Ecrivain d’une humanité tranquille, fataliste, souvent contemplative et drôle, Díaz-Eterovic a le génie de la douceur pour faire passer des situations terribles. » Lire l'article entier ici.
    Christophe Laurent
    NICE MATIN ET VAR MATIN
  • « Difficile de ne pas tomber sous le charme de ce roman plein d’humour et traversé par une certaine élégance, où l’on découvre un Chili insoupçonné. » Lire l'article entier ici. Plus d'infos ici.
    Yann Plougastel
    M LE MAGAZINE DU MONDE
  • « Nous sommes tous des Hérédia perdus entre sentiments et raison, entre tendresse et mélancolie, nous avons tous un peu du pragmatisme du chat Simenon. Ce beau roman très abouti nous le rappelle de façon magistrale.» Lire l'article entier ici.
    Louis Laurent
    ESPACE LATINOS
  • « Quelle atmosphère ! Tel un Simenon chilien, Diaz-Eterovic nous fait vivre au rythme du petit peuple de Santiago, avec une prédilection pour les tenanciers et les paumés d’une cité qui n’a rien à enlever – côté rudesse – aux métropoles du continent. » Lire l'article entier ici.
    Marianne Payot
    L’EXPRESS

1


Au loin, des cris, des hurlements de chiens et de sirènes troublaient le silence de la nuit. L’ampoule au plafond répan­dait une lumière bleutée qui éclairait à peine le trou creusé entre mon lit et celui de mon voisin, un vieillard cadavérique qui avait arrêté de sangloter depuis une demi-heure. La peur me tenaillait, la sueur poissait mon front. Je voulais prendre la fuite, mais je n’ai pas réussi à bouger. Mes mains et mes jambes étaient attachées aux barreaux du lit. Une sonde dans le bras gauche me reliait au goutte-à-goutte méthodique du sérum qui pendait au plafond. Je pouvais imaginer mon visage émacié, creusé, mes joues mangées par une barbe blanche et épaisse, mes lèvres desséchées et mes dents tachées de nicotine. Je n’avais pas besoin d’une boule de cristal pour savoir que j’étais en train de mourir. Seul, définitivement vieux, tout au bout du rouleau. Qui m’avait amené dans cette salle ? Depuis combien de jours étais-je alité ? Quel âge avait ce corps qui me contenait malgré lui ? Où étaient mes amis ? Mes anciennes maîtresses ? Je ne parvenais plus à me souvenir. J’avais tout oublié de ma vie, ce que je mettais sous ce dernier mot n’était qu’un long mur vide. La seule chose réelle semblait être la salle et les vieillards moribonds qui m’entouraient.
Le bruit que faisait une infirmière en déplaçant un lit d’un bout à l’autre de la pièce a attiré mon attention. Je savais ce que ce bruit voulait dire. Le vide laissé par un malade qui était parvenu à s’échapper vers l’inconnu. J’ai essayé de bouger mes bras, mais je n’ai réussi qu’à redoubler la rigueur des sangles. N’y a-t-il pas une autre façon de mourir ? ai-je demandé à voix haute. L’écho de ma voix s’est répandu en pure perte dans la chambre. La porte s’est soudain ouverte et j’ai entendu quelqu’un qui approchait. Des pas inconnus et discrets. Sous la lumière de l’ampoule, j’ai aperçu le visage d’un inconnu, son sourire, l’éclat furtif de ses yeux. La détermination de son regard m’a fait craindre le pire.
- Si je ne l’avais pas vu, je ne l’aurais pas cru. La vie t’a vrai­ment maltraité, a dit l’inconnu.
- Qui es-tu ?
- J’ai attendu ce moment depuis longtemps. Seuls tous les deux, sans personne pour nous déranger. J’avoue que je ne m’attendais pas à te trouver si mal fichu.
- Qui es-tu ?
- Tu ne me reconnais pas ? Nous avons déjà été ensemble. J’ai souvent senti ton haleine et ta rage. Nous sommes de vieilles connaissances.
- Détache-moi et permets-moi de me défendre.
L’inconnu a souri, une couche de glace semblait recouvrir ma peau.
- C’est un peu tard pour faire appel à ce genre de trucs.
- Dis-moi au moins ton nom.
- Tu ne t’en souviens plus ? a demandé l’inconnu en bran­dis­sant le pistolet qu’il venait de sortir de la poche de sa veste. Qu’est-ce que tu préfères, une balle dans le cœur ou dans la tête ?
J’ai vu l’arme dirigée contre ma poitrine. J’ai rassemblé les dernières forces qui me restaient et avec l’aveugle insoumission d’autrefois, j’ai crié de toutes mes forces. J’ai entendu la détonation et j’ai ouvert les yeux. J’étais dans ma chambre, le soleil du matin baignait la fenêtre. Rien ne m’attachait au lit. Je me suis levé. Devant la glace de la salle de bains, j’ai retrouvé les mêmes yeux cernés que la nuit précédente.
- Encore un cauchemar ? a demandé Simenon derrière mon dos.
- J’étais vieux et quelqu’un allait me tuer.
- Depuis un certain temps, tu penses trop à la Parque.
- J’ai peur que les forces m’abandonnent et que n’importe qui puisse se moquer de moi. Je suis à l’âge idéal pour commen­cer à dialoguer avec la mort.
- Tu devrais penser à des choses plus utiles. Ça fait combien de jours qu’aucun client ne vient dans ton bureau ?
- Je ne me souviens plus.
- Les actions “Heredia et associés” sont à la baisse.
- Le flair et l’intuition sont passés de mode. Tout se moder­nise, la caresse glacée d’un code et d’un bouton insen­sible a pris toute la place, ai-je dit en allant dans la cuisine avec la ferme intention de me préparer un café.
- “Que l’argent manque ou abonde, la vieillesse et les années arrivent toujours”, a ajouté Simenon, se souvenant d’un vers de Armando Uribe.
- Depuis quand les chats citent les poètes ?
- J’ai pris tes mauvaises habitudes.
- Collectionner les citations et les bars est mon hobby.
- Je ne l’oublie pas, je t’aide simplement à affronter tes cauchemars.
- Rien qu’un café et une promenade dans le quartier ne guérissent.
- Tu peux aussi essayer la ciguë.
- Je ne veux plus entendre parler de vieillards et de morts.

Né à Punta Arenas en 1956, Ramon Díaz-Eterovic est l’un des leaders incontestés de la nouvelle génération d’écrivains -nés depuis 1948- qui symbolisent le mouvement artistique le plus attrayant de la scène culturelle du Chili des années 90. Parallèlement à son travail d’écriture, Díaz-Eterovic participe activement à la Société des Ecrivains du Chili, qu’il a présidé de 1991 à 1993. Ramon Díaz-Eterovic est un écrivain très prolifique, il a publié un grand nombre de nouvelles et de story-boards pour des dessins animés et de la poésie. Il manifeste un intérêt profond pour la psychologie humaine et une forte intuition pour les histoires à intrigues. Ramon Díaz-Eterovic a été récompensé par de nombreux prix littéraires, et parmi eux, par le prix renommé Anna-Seghers 1987 en Allemagne, le prix Dashiel Hammett en Espagne et en 2007, le prix municipal de Littérature de Santiago (Chili).

Bibliographie