Dans la presse

LA TRIBUNE DE GENEVE

Etienne Dumont

"Le polar a toujours constitué le vrai roman social. De par sa fonction, l'enquêteur traverse les milieux les plus divers à la recherche d'une réponse qui importe finalement moins que la question subsidiaire. Comment ceci est-il possible ?
Ainsi en va-t-il avec Sandrone Dazieri, dont les ouvrages peinent à faire leur trou en France. Il faut dire que l'Italien jongle avec les difficultés. Son protagoniste souffre d'une double schizophrénie. Il porte le même nom que l'auteur. Cet être sentimental et brouillon s'endort en plus régulièrement pour faire place à son Associé. Un Associé qui constitue bien sûr un autre lui-même.Après Sandrone et Associé, puis Sandrone se soigne, les Editions Métailié proposent aujourd'hui Le Blues de Sandrone. Un blues au sens propre. De vieilles chansons américaines rythment l'action, centrée autour du lac Majeur. C'est l'occasion pour le Crémonais, qui a été de tous les mouvements milanais gauchistes et alternatifs, de refaire le portrait de son Italie. Sous la façade touristique grouillent les clandestins, les squatteurs, les ex-soixante-huitards et leurs ennemis mortels, les néofascistes. Le lecteur ne s'étonnera pas si quelques retours en arrière le conduiront à Gênes, pendant le G8 de juillet 2001.Noir et poisseux, mais aussi ironique et tendre, le polar se lit d'une traite. L'histoire retient moins que les personnages. Ceux-ci doivent beaucoup à l'art de l'écriture. La traduction de Serge Quadruppani se révèle excellente. On l'aura compris. Il s'agit d'un excellent livre.