Dans la presse

OH LA !

Adeline Fleury

C'est avec des petits riens que l'on fait les grands romans. C'est avec des petits riens que l'on tisse les fils narratifs de qualité. Des petits riens foisonnants qui font la richesse de ce très beau texte autobiographique. Maruja Torres a le talent de saupoudrer son œuvre de détails olfactifs relevés (les relents soufflés par le vent du port de Barcelone), de plaisirs gustatifs savoureux (le goût du chocolat ou du fuet, spécialité catalane de saucisson sec), de doux souvenirs visuels (un grand bateau blanc prenant le large dans les eaux méditerranéennes). L'auteur choisit la voie des réminiscences d'enfance pour dépeindre la vie tumultueuse dans le Barrio Chino de Barcelone. Un quartier très populaire, où les enfants côtoient les prostituées tout naturellement, pénètrent dans les bars un peu chauds et découvrent le monde peu reluisant des adultes. Sans s'étendre sur des fleuves descriptifs, Torres réussit, au travers des yeux d'une fillette de 12 ans nommée Manuela, à nous happer dans les entrailles du Barrio tel qu'il était en 1954. Le tout piqué d'une plume douce amère.