Publication : 12/02/2015
Pages : 208
Grand Format
ISBN : 979-10-226-0160-3
Couverture HD
Numérique
ISBN : 979-10-226-0300-3
Couverture HD

Disparaître de soi

Une tentation contemporaine

David LE BRETON

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17 €
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14,99 €
Langue originale : Français (France)

Il arrive que l’on ne souhaite plus communiquer, ni se projeter dans le temps, ni même participer au présent ; que l’on soit sans projet, sans désir, et que l’on préfère voir le monde d’une autre rive : c’est la blancheur. La blancheur touche hommes ou femmes ordinaires arrivant au bout de leurs ressources pour continuer à assumer leur personnage. C’est cet état particulier hors des mouvements du lien social où l’on disparaît un temps et dont, paradoxalement, on a besoin pour continuer à vivre.

David Le Breton signe là un livre capital pour essayer de comprendre pourquoi tant de gens aujourd’hui se laissent couler, sont pris d’une “passion d’absence” face à notre univers à la recherche de la maîtrise de tout et marqué par une quête effrénée de sensations et d’apparence. Voilà qu’après les signes d’identité, c’est cette volonté d’effacement face à l’obligation de s’individualiser, c’est la recherche d’un degré a minima de la conscience, un “laisser-tomber” pour échapper à ce qui est devenu trop encombrant, qui montent. La nouveauté est que cet état gagne de plus en plus de gens et qu’il est de plus en plus durable. David Le Breton, avec cet ouvrage en forme de manifeste, fait un constat effrayant et salutaire de notre engourdissement généralisé. Nous sommes tous concernés par ce risque d’une vie impersonnelle.

  • "En ville, j’ai l’impression d’être le seul à regarder le monde autour de moi. Les autres regardent leurs écrans. Ça ne peut que se retourner contre les individus à un moment ou un autre." Lire l'entretien ici

    Camille Destraz
    Le Temps
  • "Un bel éloge pour les vertus existentielles des passages à vide." Lire l'article ici
    Coups de cœur de la rédaction
    Philosophie Magazine
  • "Quelque soit la forme, ces petites morts révèlent que 'la continuité de soi n'est finalement qu'une croyance nécessaire afin de pouvoir vivre'." Lire l'article ici
    Maud Navarre
    Sciences humaines
  • "Le Breton traque les exemples de ces parenthèses de vie." Lire l'article ici
    Sophie Pujas
    Le Point Références
  • "Un très bel essai, novateur par son thème, riche par l'ampleur des sources sociologiques, anthropologiques, philosophiques et littéraires qu'il convoque et questionne." Lire l'article ici
    Claudine Sagaert
    Implications philosophiques
  • "David Le Breton donne une voix et un sens à ces comportements limites. Son humanisme est inspirant, fécond." Lire l'article ici.
    Maxime Coulombe
    Etudes
  • "L'approche théorique, le choix des sujets, le style de Le Breton sont on ne peut plus singuliers." Lire l'article ici
    François Poirié
    Art Press
  • "Dans le prolongement de son passionnant travail d'anthropologie des identités et des corps, l'auteur dresse ici une cartographie des multiples manières de disparaître." Lire le portrait ici, le débrief d'Alexandre Gamelin et la citation du livre dans le best of du 4 mars ici
    Jean-Marie Durand
    Les Inrockuptibles
  • "C'est un ouvrage comme on les aime, léger et profond à la fois, plein de bon sens et d'enseignements." Lire l'éditorial ici
    Editorial de Lydia Bacrie
    L'Express Styles
  • "Dans des pages saisissantes, le sociologue décrit ces évanouissements, qui ont pour point commun l'effacement de la sensation, le souhait ultime de se "déprendre de soi." Lire l'article ici
    Christilla Pelle-Douel
    Psychologies magazine
  • Voir l'interview ici
    Monique Atlan
    France 2 "Dans quelle éta-gère"
  • Ecouter l'émission ici
    Caroline Broué en compagnie d'Antoine Mercier et Mathieu Potte-Bonneville
    France Culture "La Grande Table"
  • Ecouter l'interview ici
    Mathieu Vidard en compagnie de Pierre-Henri Tavoillot
    France Inter "La Tête au carré"
  • "En combinant ressources littéraires ou poétiques et données des sciences humaines, il forge un style original pour approcher ce que ces stratégies auto-nettoyantes ont en commun, en dépit de leur disparité, et qu'il nomme la blancheur." Article à lire ici.
    Roger-Pol Droit
    Le Monde des livres
  • "Dans une langue dense, au plus près de nos expériences intérieures, David Le Breton [...] interroge une fois encore notre rapport au monde et nous tend le miroir de nos expériences saturées." Découvrir l’article et les bonnes feuilles ici
    Elisabeth Marshall
    La Vie
  • "Au lieu de noircir le tableau, l'anthropologue David Le Breton inscrit ces conduites dans une quête de ce qu'il appelle "la blancheur"."  Lire l'article ici
    Mathilde Lequin
    Philosophie magazine

Nos existences parfois nous pèsent. Même pour un temps, nous aimerions prendre congé des nécessités qui leur sont liées. Se donner en quelque sorte des vacances de soi pour reprendre son souffle. Si nos conditions d’existence sont sans doute meilleures que celles de nos ancêtres, elles ne dédouanent pas de l’essentiel qui consiste à donner une signification et une valeur à son existence, à se sentir relié aux autres, à éprouver le sentiment d’avoir sa place au sein du lien social. L’individualisation du sens, en libérant des traditions ou des valeurs communes, dégage de toute autorité. Chacun devient son propre maître et n’a de compte à rendre qu’à lui-même. Le morcellement du lien social isole chaque individu et le renvoie à lui-même, à sa liberté, à la jouissance de son autonomie ou, à l’inverse, à son sentiment d’insuffisance, à son échec personnel. L’individu qui ne dispose pas de solides ressources intérieures pour s’ajuster et investir les événements de significations et de valeurs, qui manque d’une confiance suffisante en lui, se sent d’autant plus vulnérable et doit se soutenir par lui-même à défaut de sa communauté.

 

Dans une société où s’impose la flexibilité, l’urgence, la vitesse, la concurrence, l’efficacité, etc., être soi ne coule plus de source dans la mesure où il faut à tout instant se mettre au monde, s’ajuster aux circonstances, assumer son autonomie. Il ne suffit plus de naître ou de grandir, il faut désormais se construire en permanence, demeurer mobilisé, donner un sens à sa vie, étayer ses actions sur des valeurs. La tâche d’être un individu est ardue, surtout s’il s’agit justement de devenir soi.

Au fil de ce livre, j’appellerai “blancheur” cet état d’absence à soi plus ou moins prononcé, le fait de prendre congé de soi sous une forme ou sous une autre à cause de la difficulté ou de la pénibilité d’être soi. Dans tous les cas, la volonté est de relâcher la pression.

 

Il s’agit ici de plonger dans la subjectivité contemporaine et d’en analyser l’une des tentations les plus vives, celle de se défaire enfin de soi, serait-ce pour un moment. Sous une forme douloureuse ou propice, cette étude arpente une anthropologie des limites dans la pluralité des mondes contemporains, elle s’attache à une exploration de l’intime quand l’individu lâche prise sans pour autant vouloir mourir, ou quand il s’invente des moyens provisoires de se déprendre de soi. Les conditions sociales sont toujours mêlées à des conditions affectives.

Et ce sont ces dernières qui induisent par exemple les conduites à risque des jeunes dans un contexte de souffrance personnelle, ou qui font advenir la dépression, et sans doute la plupart des démences séniles. Si souvent les approches psychologiques occultent l’ancrage social et culturel, celles des sociologues délaissent souvent les données plus affectives, considérant les individus comme des adultes éternels, n’ayant jamais eu d’enfance, ni d’inconscient, ni de difficultés intimes. La compréhension sociologique et anthropologique des mondes contemporains peut ressaisir la singularité d’une histoire personnelle en croisant la trame affective et sociale qui baigne l’individu et surtout les significations qui alimentent son rapport au monde. Telle est la tâche de ce livre.

 

Sommaire :

 

  1. N’être plus personne

La vie impersonnelle – Indifférence – Pessoa : se multiplier pour n’être personne – De Lawrence d’Arabie à J. H. Ross.

 

  1. Manières discrètes de disparaître

Disparaître dans le sommeil – Le pachinko ou les astuces de l’effacement – La fatigue désirée – Burn out – Dépressions – Personnalités multiples – Immersion dans une activité.

 

  1. Formes de disparitions de soi à l’adolescence

Effacer les contraintes de l’identité – Errance d’espace, errance à soi – Au cœur de la blancheur – Glisser dans l’infini du virtuel – Hikikomori – La disparition dans l’autre – La longue transe anorexique – La défonce comme quête du coma – Le contre-monde des produits psychoactifs – Le goût de la syncope – Disparaître et revenir.

 

  1. Alzheimer : disparaître de son existence

Vieillir – Alzheimer – Accompagner le détachement.

 

  1. Disparaître sans laisser d’adresse

S’absenter – Disparaître autrefois – Disparaître aujourd’hui – Organiser sa disparition – La disparition de Majorana – Figures littéraires de la disparition.

 

  1. Soi comme fictions

L’identité comme processus – Fragiles identités.

 

Ouverture : Les tentations de la subjectivité contemporaine

David LE BRETON est professeur de sociologie à l’Université de Strasbourg. Membre senior de l’Institut universitaire de France. Membre de l’Institut des études avancées de l’Université de Strasbourg (USIAS). Il est l’auteur d’une œuvre considérable, avec entre autres : Marcher la vie. Un art tranquille du bonheur, Rire. Une anthropologie du rieur, et La saveur du monde.